Partager

« Dekolonizasyon », c’est sous cette étiquette combien évocatrice que Youry Vixamar a décidé d’acheminer au public haïtien son tout premier album studio au début de ce mois d’octobre. En publiant cet opus, l’artiste entend offrir à ses compatriotes un cocktail musical fortement influencé d’Afro-Pop et de vodou, une tendance digne de les sensibiliser en ce qui a trait à leurs identités culturelles, d’autant que la mise en vedette du tambour est faite d’une manière extrêmement envoûtante tout au long du projet.

En effet, Youry Vixamar a eu un parcours inspirant dans la musique. Exposé dès son plus jeune âge à de multiples instruments, c’est le tambour qu’il a fini par dompter en prenant des cours à l’ENARTS. Ainsi, il s’est frayé un chemin dans le milieu artistique en mettant à profit son talent au sein de plusieurs groupes dont Brothers Posse, avant de décider, depuis 2010, de faire cavalier seul pour mieux exposer son instrument fétiche dans ses propres compositions. Une nouvelle orientation artistique qui s’est révélée plus tard un bon choix, puisque son morceau titré « Gran bwa », sorti en 2017, et qui figure également sur son nouvel écrin, l’a permis d’accompagner l’équipe du film Freda au Festival de Cannes 2021, après avoir été choisi par Géssica Géneus pour le défilé au tapis rouge.

Toujours au nom du tambour, cet instrument hautement symbolique du patrimoine culturel haïtien, Youry a délivré, le 3 octobre 2021 dernier, son premier opus baptisé « Dekolonizasyon ». Un album qui a conjugué la voix de nombreux artistes dont Jean Michel Jahman, Badikamall et Misty Jean, dans le but de lancer un vibrant message au public haïtien en 10 tracks, rythmés par les battements du tambour dans une complicité hors du commun avec l’afrobeat. L’album « Dekolonizasyon » est donc un cri d’alarme retenti en écho au tambour pour inviter les Haïtiens à se tourner vers leur culture originelle.

En fait, au-delà des aspects classiques qu’évoque la décolonisation, l’artiste s’est appuyé de préférence sur les idées véhiculées à travers son projet pour illustrer la sienne dans une dimension culturelle. « Dekolonizasyon pou mwen se remete an kesyon tout sa yo te aprann nou sou istwa n kòm pèp. Nou bezwen dekolonize mantal nou avan. Chache konnen kiyès ayisyen ye nan tout dimansyon l. », soutient-t-il en référence aux messages mis en scène à travers les clips du projet tels que « Delivrans », « Maji », ou encore le morceau titré « Banm Rasin Mwen ». 

C’est surtout pour créer une meilleure confrontation par rapport à l’envahissement de l’industrie musicale haïtienne par d’autres styles musicaux étrangers que Youry Vixamar appelle les mélomanes à revisiter leurs racines. « Fò k nou aprann mete an valè tout richès ki gen nan kilti nou. Sonje zansèt nou ak ki kote n sòti. Fòk nou chache divizyon pami nou. Si non, se kòmsi n te toujou nan esklavaj. », conclut-il au cours d’un entretien donné à Rythmes 509 au sujet de son œuvre, avec espoir que les Haïtiens vont finir un jour par se dépouiller du joug de la domination culturelle. Et l’artiste espère que son projet « Dekolonizasyon » puisse aider en ce sens. 

Bébéto Jean


Partager