Zenglen - Bravo
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Entre le coté informel du marché musical et l’indiscipline des artistes entre autres, les conditions ne sont pas souvent favorables à la longévité des groupes musicaux haïtiens. Mais n’empêche qu’il y a des groupes qui ont su trouver les stratégies nécessaires, pour perdurer, malgré les embuches. Cette année 2022 ramène les trente-trois (33) ans d’existence du groupe Zenglen dans la musique haïtienne. Trente-trois (33) ans, un chiffre d’une valeur immense, pour un groupe toujours en activité, dans une industrie musicale accusant des déficits d’ordre   structurel. 

Peu importe le classement, Zenglen aura toujours une place importante parmi les groupes qui, sous une forme ou autre, auront marqué de leur empreinte la musique haïtienne, le secteur du Compas Direct en particulier durant les trente dernières années. En dépit des soucis administratifs auxquels il est souvent confronté, mais, du haut de ses trente-trois (33) ans, Zenglen fait partie de ces groupes qui ne déçoivent jamais, ou qui déçoivent rarement, quand il est question de productions studio. Le temps a passé, les visages des musiciens ont changé, mais l’identité de Zenglen reste la même en termes de qualité. 

C’est en quelque sorte la philosophie même de Zenglen ; garder son identité, tout en restant proche de ce qui se fait dans le temps. Une alliance qui reste un défi majeur pour beaucoup de groupes, qui n’ont pas la capacité de rester eux-mêmes face à la pression de la mode. Mais quant à Zenglen, le groupe a su s’adapter brillamment avec les vagues de la modernité, influencée par de nouvelles sonorités, exigeant du coup une nouvelle approche dans la production, notamment au niveau des arrangements. Par conséquent, d’une génération à une autre, la musique de Zenglen est toujours à la mode. C’est comme pour donner une sorte de légitimité au slogan « Lifetime guarentee », très cher à l’équipe « 5 étoiles ». 

Cela prend de plus en plus forme d’une tradition. Malgré le poids des ans, une santé administrative pas toujours au top, et la concurrence déloyale du marché, à chaque nouvel album, Zenglen a cette capacité de mettre la HMI à ses pieds, tant la qualité de ses produits force naturellement l’admiration. Et le dernier disque en date, en l’occurrence « Bravo » n’échappe pas à cette règle. Comme d’autres titres qui l’ont précédé, le nouvel opus a eu droit aussi à son petit évènement, peu de temps même après son arrivée dans les bacs. Du simple consommateur, en passant par les critiques jusqu’aux confrères musiciens, tout le monde y va de son commentaire positif sur le nouvel album de Zenglen. 

Les nouvelles productions de Zenglen sont toujours accueillies dans l’euphorie du grand public, déjà acquis à la cause du groupe trentenaire. Cependant, quand il vient le moment de récolter les fruits (nombre d’affiches et de prestations) de ses albums, la bande se porte souvent moins bien. Car d’une crise à une autre, il y a toujours quelque chose pour venir freiner l’élan du groupe, qui devrait plutôt profiter de la qualité de ses nouvelles œuvres, pour se faire une santé en termes de présence dans les festivités et les soirées dansantes. 

Il y a bien des raisons pour expliquer ce phénomène, cette situation, très préjudiciable à la réputation dont souvent jouit Zenglen dans le milieu musical ces dernières années. Défection des musiciens, structure managériale, communication non adaptée aux nouvelles exigences du marché etc. En fait, disons que la raison principale est tout d’abord d’ordre structurel, notamment dans les approches promotionnelles. Car contrairement à d’autres groupes qui investissent beaucoup dans un plan de marketing pour soigner leur image, faire atteindre leurs œuvres à une large audience, à Zenglen, apparemment on ne fait que miser sur la qualité des produits. Ce qui n’est pas suffisant, dans une petite industrie comme la HMI, où la concurrence est parfois très rude et déloyale. Alors, beaucoup moins agressif que les autres dans ses stratégies de promotion et de marketing, se référant à la quantité des affiches et des spectacles, Zenglen a souvent peu bénéficié des retombées de ses albums.

Cependant, en dépit entre autres de certains soucis au niveau d’administration, des stratégies de promotion et de marketing inefficaces, durant ses trente-trois (33) ans d’existence, Zenglen reste un groupe respectable et respecté dans le milieu musical haïtien. Un groupe qui a fait école. Surtout qu’en termes de productions, le groupe s’arrange toujours à offrir une bouffée d’allégresse aux consommateurs, qui ne cachent jamais leur amour pour la belle équipe de Zenglen, réunie autour de Jean Brutus Dérissaint, le gardien du temple, toujours fidèle à son groupe et sa philosophie musicale.

Crédit photo : Instagram de Zenglen

Osman Jérôme 


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